"Pendant la panthéonisation, la persécution continue" (G. Boulanger)

Dans L’OBSERVATEUR  du 21 mai 2015
Gérard BOULANGER ( * ) publie
 
“LA PERSECUTION CONTINUE”
 

JEAN ZAY (1904-1944).

 

 

Durant mon enquête sur Jean Zay, j'avais bien sûr été frappé par l'amnésie collective dont était victime un homme aux éclatantes vertus civiques et au bilan ministériel inégalé. Je le suis aujourd'hui par la tempête de protestations née à l'annonce de sa panthéonisation.

 

Or, par son départ à bord du « Massilia » vers le Maroc pour continuer le combat le 20 juin 1940, par le procès inique et truqué (au prix d'un faux initial que j'ai découvert) que lui intenta Vichy pour une imaginaire « désertion en présence de l'ennemi », par sa condamnation, le 4 octobre 1940, à la même peine de déportation que Dreyfus, par sa rédaction en prison des comptes rendus, ensuite diffusés par la Résistance, du procès de Riom contre Blum et Daladier, par ses liens, encore, avec l'Organisation civile et militaire, Jean Zay était ô combien un authentique résistant. De la première heure jusqu'à son assassinat, le 20 juin 1944. Ce qui fut officiellement reconnu après guerre par l'arrêt de réhabilitation de la cour de Riom du 5 juillet 1945, comme par l'attribution du certificat n° 10779 au titre de « résistant isolé » le 10 mars 1949. Isolé, c'est bien le mot. Et c'est encore de l'isoler que tentent les héritiers actuels des antisémites et antirépublicains d'hier.

 

Grâce à la générosité de ses filles Catherine et Hélène, qui me permirent de consulter les archives familiales, il m'apparut que c'était sans doute justement à cause de sa valeur républicaine que l'action de Jean Zay fut occultée. Force est de constater que son intense activité militante, pour les droits de l'homme, la laïcité et la République, non moins que son orientation résolument unitaire ne cessèrent de gêner et de mettre en échec la droite et l'extrême droite orléanaises.

 

Militant radical-socialiste de toujours, Jean Zay fut en 1932, à seulement 27 ans, le plus jeune député de France. Il devint alors, en un temps record, le dirigeant reconnu de l'aile gauche de sa formation politique et l'artisan résolu de l'alliance entre les trois grands partis de gauche (radicaux, socialistes et communistes). C'est ainsi que le 10 février 1935 le Front populaire était virtuellement constitué dans le Loiret, avant même que d'être mis en route au plan national. Son action lui valut de devenir, en janvier 1936, sous-secrétaire d'Etat. Mais surtout, de juin 1936 à septembre 1939, et avec l'appui de Léon Blum, l'inamovible ministre de l'Education nationale et des Beaux-Arts du Front populaire. La droite, extrême ou non, lui en voulut d'autant plus d'être le ministre de « l'Ecole sans Dieu ».

 

Mais c'est dès sa première campagne de 1932 que la droite orléanaise l'attaqua violemment. Sur un texte qui lui avait été volé et qui fut publié contre son gré en 1933 par le journal maurrassien « l'Action française » : « le Drapeau », un pastiche dans le style de l'antimilitariste Gustave Hervé (devenu par la suite un thuriféraire de Pétain...). De même, alors que, non mobilisable, il choisit dès 1939 de rejoindre le front, l'extrême droite ne cessa de le dépeindre comme un déserteur. Ce qui lui coûta en 1940 sa liberté, en 1944 la vie, et aurait pu lui coûter post mortem son honneur.

 

Ces attaques procédaient au fond du mythe augustinien du Juif errant, renouvelant le mythe patristique du peuple déicide et celui, inquisitorial, de la pureté du sang. Mais aussi du mythe vaticano-orléanais de Jeanne d'Arc. Autrement dit, pour combattre efficacement ce symbole de la République qu'était Jean Zay, la droite extrême ou non eut recours à tous les mythes fondateurs de l'antisémitisme. La haine raciste fut du reste l'arme politique absolue utilisée contre tous les grands « juifs d'Etat ». D'une certaine manière, Zay, d'origine juive par son père mais protestant par sa mère et agnostique par choix, en est mort. Assassiné par la Milice, héritière de l'imaginaire national-catholique.

 

C'est à cette aune qu'il faut mesurer la virulente campagne contre le transfert des cendres de Jean Zay au Panthéon. Déclenchée par une quarantaine d'associations d'anciens combattants, pour beaucoup proches de l'extrême droite antirépublicaine (dont seulement deux se sont dissociées), immédiatement relayée par un article du fascisant « Rivarol », elle se poursuit avec encore plus de préjugés antisémites sur internet. En somme, pendant la panthéonisation, la persécution continue.

 

( * ) Avocat des parties civiles durant les vingt-trois ans de l'affaire Papon, GÉRARD BOULANGER a notamment publié chez Calmann-Lévy « le "Juif" Mendès France. Une généalogie de l'antisémitisme » (2007) et « l'Affaire Jean Zay. La République assassinée » (2013).

 

Retrouvez l'intégralité de l'article de Gérard Boulanger sur Bibliobs.com 


 

Ce 26 mai 2015 sur LCP: "L’école est à nous ! ou comment Jean Zay révolutionna l’Education nationale"

A l’occasion de la panthéonisation de Jean ZAY,
hommage au ministre de l’Education nationale du Front populaire et à l’esprit de Résistance
 
La chaine parlementaire LCP diffuse le mardi 26 mai à 20h35
 
un documentaire de 52 minutes de Stéphane Benhamou:  
“L’école est à nous ! ou comment Jean Zay révolutionna l’Education Nationale
 
Egalement sur FR3 Centre-Val de Loire 
demain 23 mai 2015 à 15h20
 

Jean Zay à l’honneur sur France 3 (23-29 mai)

Pour la panthéonisation de Jean Zay, France 3 Centre-Val de Loire mobilise ses équipes et met en place un dispositif éditorial important. Reportages, magazines, documentaires, web… En Mai Jean Zay est à l’honneur sur France 3 Centre-Val de Loire.

 

“Jean Zay, un crime français” : samedi 16 mai à 15h20

 

Un film de Catherine Bernstein qui enquête sur l’assassinat de Jean Zay. Incarcéré pendant quarante mois à la maison d’arrêt de Riom sous le régime de Vichy, il disparait mystérieusement le 20 juin 1944. Retour sur les circonstances d’un crime français, et celles après guerre lors du procès de l’assassin…

 Voir la bande-annonce: https://www.youtube.com/watch?v=Gk28wecaOE0&feature=player_embedded

La semaine Jean Zay : du lundi 18 au vendredi 22 mai

Lors de la semaine de la panthéonisation, la rédaction web consacre 5 portraits au grand homme, pour découvrir chaque jour une nouvelle facette de sa personnalité. La cérémonie sera retransmise en direct sur notre site web le jour J. Les éditions 7 au Centre de la semaine seront consacrées à la panthéonisation de Jean Zay.

La Voix est Libre : samedi 23 mai à 11h30

Présentée par Christophe Carin, l’émission s’axera autour de «Jean Zay, franc-maçon». Que représente la panthéonisation pour les Maçons français ? 

«Jean Zay ou la deuxième révolution de l’éducation nationale»
Samedi 23 mai à 15h20

Un film de Stéphane Benhamou qui revient sur le grand chantier d’innovation et de rénovation effectué par Jean Zay au sein du système scolaire français. Soucieux de faire entrer la culture dans tous les foyers, il est à l’origine du CROUS, du CNRS, et des bibliobus. Entre Paris, Orléans et la région Centre qui l’a vu naître et grandir, le film revient sur les grands moments de la vie de Jean Zay et l’héritage qu’il laisse encore aujourd’hui derrière lui, auprès des collégiens et lycéens dans des établissements qui portent davantage que son nom…

Enquête au Centre : vendredi 22 mai à 23h10

Présenté par Jocelyne Thuet, le magazine d’investigation consacrera une enquête aux conséquences des attentats de Janvier. «Jean Zay et l’école laïque et publique» : que reste-t-il de l’héritage de Jean Zay dans l’école laïque d’aujourd’hui?

 

Exposition virtuelle: Entrée de quatre figures de la Résistance au Panthéon

Le département AERI ( * )  de la Fondation de la Résistance
 
a le plaisir de vous annoncer la mise en ligne de l'
 
exposition virtuelle :
 
 
 
sur le Musée de la Résistance en ligne.
 
 
Le 27 mai 2015, quatre figures représentatives de l’esprit de Résistance rejoindront le Panthéon : Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Jean Zay Il s'agit de "deux femmes et de deux hommes qui ont incarné les valeurs de la France quand elle était à terre", a expliqué le chef de l'Etat lors d’un discours le 21 avril 2014. Le Président de la République a choisi deux femmes aussi "pour rappeler la contribution de toutes celles, anonymes le plus souvent, qui ont fait partie de l'armée des ombres".

Dans son discours, le Président expliquait pourquoi ces choix : « Germaine Tillion, c’est l’égalité. L’égalité entre les hommes et les femmes, l’égalité entre les cultures, l’égalité entre les peuples. », « Geneviève Anthonioz-De Gaulle, c’est la fraternité. La fraternité dans la Résistance, fraternité dans la déportation, la fraternité pour la condition humaine. », « Pierre Brossolette, lui, c’est la liberté. » et « Jean Zay, c’est la République ».

A l’occasion de cette panthéonisation, l’équipe du musée de la Résistance en ligne vous propose de suivre dans cette exposition virtuelle les parcours de ces quatre personnalités.

dont:

Jean Zay 

 

Avocat et journaliste, élu en 1932 député radical socialiste de la première circonscription du Loiret dès sa première tentative, à 27 ans, Jean Zay sera le plus jeune ministre de la troisième République en 1936, à 31 ans.

Il sera le titulaire jusqu'à la guerre durant quarante mois d'un très vaste portefeuille de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts, qui couvrit aussi les départements actuels de la recherche, de la jeunesse et des sports. Il lance de profondes réformes de l’enseignement scolaire et technique, de la recherche, du droit d’auteur. Il propose la création de l’École nationale d’administration.

Figurent parmi les actions de Jean Zay pour la culture : une réforme des Archives nationales et de la Bibliothèque nationale, les bibliobus, le développement du théâtre populaire, l’exposition universelle de 1937, la création du premier Festival de Cannes prévu en 1939 pour contrer la Mostra fasciste de Venise.

A la déclaration de la guerre, Jean Zay démissionne de son poste de ministre pour s'engager dans l'armée française, puis il rejoint l’Afrique du Nord à bord du Massilia.

En 1940, après une parodie de procès militaire, véritable procès politique, la dictature de Vichy le condamne à la même peine que Dreyfus. Quatre ans plus tard, les miliciens viennent le chercher dans sa prison de Riom le 20 juin 1944, l'assassinent et dissimulent son corps qui ne sera retrouvé qu'en 1948.

 

 * ) L’AERI (Association pour des Etudes sur la Résistance intérieure) a été constituée en 1993 par quelques anciens résistants connus. Parmi eux, Lucie et Raymond Aubrac, Jean-Bernard Badaire, Jean-Pierre Bloch, Jacques Delarue, Maurice Plantier, Serge Ravanel, Hélène Viannay. 

Depuis le 1er janvier 2012, l'AERI a été intégrée à la Fondation de la Résistance.  

 

"L’esprit de résistance entre au Panthéon " ce 26 mai à Orléans. - Jean ZAY "Le ministre assassiné"

Cercil-Musée-Mémorial des enfants du Vel d’Hiv

Centre d'Etude et de Recherche sur les Camps d'Internement de Beaune-la-Rolande, Pithiviers et Jargeau et la déportation juive

45 rue du Bourdon Blanc - 45000 Orléans - 02 38 42 03 91- www.cercil.fr

Le 26 mai à Orléans: Conférence du Pr. Jean GARRIGUES,
 
au CERCIL:
“Demain, 27 mai, L’esprit de résistance entre au Panthéon” 

Vient de paraître: “Jean Zay, 1904-1944 , Tombé pour l'école républicaine”

Paru en 05/2015 chez TALANDIER

Jean Zay - Le ministre assassiné

Antoine PROST, Pascal ORY


Député radical-socialiste à 28 ans, ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts de 1936 à 1939, Jean Zay fut assassiné par la milice avant même d’avoir eu 40 ans, le 20 juin 1944. Pourquoi ce destin hors du commun, cet accès précoce à de très hautes responsabilités et cette fin tragique ?

 

Pour répondre à ces questions, on retrace ici simplement et clairement la vie et l’action de Jean Zay : ses origines familiales, sa formation, son ascension politique, puis son rôle à l’Éducation nationale sous le Front populaire. Par ses projets, ses décisions, sa méthode et son style, il fut un grand ministre réformateur : classes de fin d’études primaires, sixièmes d’orientation, activités dirigées, sport à l’école, mise en réseau des centres d’orientation, création du CNRS. Chargé des Beaux-Arts, il leur donne, résolument soutenu par un mouvement de fond à la fois moderniste et démocratique, une inspiration nouvelle qui annonce les enjeux de la « Culture » d’après-guerre : réforme de la Comédie-Française, premières subventions aux « jeunes compagnies », nouveaux musées, soutien à la lecture publique, liens Culture-Loisirs, festival de Cannes…

Après Munich, c’est dans le gouvernement l’un des ministres les plus fermes dans la volonté de résister à l’Allemagne nazie. Les collaborateurs dénonceront d’ailleurs en lui un fauteur de guerre, coupable de ne pas avoir fait la paix avec Hitler. Suprêmement intelligent et cultivé, actif, organisé, ouvert, Jean Zay tranchait sur la grisaille du personnel politique d’alors. De plus, sa réussite lui promettait un rôle majeur dans les gouvernements à venir. Mais il représentait tout ce que Vichy détestait. Aussi, après un procès proprement scandaleux, le nouveau régime le condamna-t-il à la détention à perpétuité. Emprisonné à Riom pendant toute la guerre, il est finalement exécuté au coin d’un bois. *

 Ainsi finit tragiquement un ministre éminemment sympathique, efficace et moderne, qui avait mis en mouvement l’école républicaine et fait lever de grands espoirs.

 


 

Demain 27 mai 2015 : Soirée à la mémoire de Jean ZAY "Cinéma et lecture" à BOURGES

Le mercredi 27 mai 2015,
alors que la République lui rendra un hommage en transférant ses cendres au Panthéon,

 

l' Association DOUBLE CŒUR

à BOURGES

organise une soirée « cinéma et lecture » pour honorer

la mémoire de JEAN ZAY

ce résistant qui fut également le ministre des Beaux-arts à l’’origine de la décentralisation culturelle.

 

PASCAL ORY:

 
« En terme de politique culturelle je pense que c’est d’avoir convaincu une bonne partie des artistes et des interlocuteurs naturels de cette politique que l’état pouvait intervenir dans les politiques culturelles, en subventionnant, en encourageant, en faisant des choix, sans que cette intervention signifie la dictature et la mise au pas.
 
C’est quand même capital parce que ça va donner effectivement les grandes réformes de la libération, la décentralisation théâtrale, le relance de la politique des bibliothèques, puis ça va donner Malraux, les Maisons de la Culture ou les Centres d’Action culturelle, les initiatives de Jack Lang, mais tout ceci est parti d’un coup de pouce qui est essentiellement l’oeuvre du Front Populaire et donc de Jean Zay, son ministre de l’Education nationale qui était, en même temps le ministre des Beaux-arts de fait. Cela est capital. »